Comment détecter la dénutrition quand on travaille à domicile ?
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Par Shamyroko Fo-Siong
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Touchant plus de 400 000 personnes âgées vivant à domicile, la dénutrition est l’une des causes principales de chute et d’hospitalisation des séniors. De plus, 3 fois plus de personnes à domicile sont considérées à risque de dénutrition. Elle entraine une perte d’autonomie et peut remettre en cause le maintien à domicile. Pourtant, il est possible de favoriser ce maintien et la bonne santé des personnes accompagnées par les SAAD / SSIAD / SPASAD en agissant dans la prévention nutritionnelle.
Ainsi, le suivi individuel à domicile CDIET permet une prise en charge individualisée avec en partie prenante les professionnels du domicile et une diététicienne CDIET. Cela permet d’améliorer la qualité de vie et la santé des bénéficiaires, apporte un nouveau soutien à leurs familles et soulage particulièrement les professionnels du domicile sur la question alimentaire.
En amont de toute action avec les patients, nous réalisons, avec la responsable du SSIAD et parfois d’autres membres de l’équipe du COSI un pré-repérage du risque nutritionnel. Nous utilisons pour cela une grille de risque très simple d’utilisation appliquée à l’ensemble des bénéficiaires en quelques minutes. Cela permet à tout le monde de prendre l’habitude d’évaluer rapidement le risque nutritionnel, et parfois de mettre une haute priorité sur certains bénéficiaires.
La responsable du SSIAD nous transmet les coordonnées des bénéficiaires autonomes auprès de qui nous réaliserons le suivi nutritionnel en direct. Pour les bénéficiaires non autonomes, le bilan est réalisé avec les salariés du COSI en présence du bénéficiaire.
En amont de cette transmission de coordonnées, CDIET et le COSI ont signé une convention de partage de données personnelles, et les salariés du COSI ont simplement à remettre une brochure de présentation du suivi nutritionnel aux bénéficiaires repérés.
Dans un délai de 5 jours après réception des coordonnées, nos diététiciennes contactent les bénéficiaires par téléphone afin de les sensibiliser à l’importance de la nutrition et leur proposer le suivi nutritionnel. Plusieurs cas de figure :
Ce bilan, réalisé par téléphone dure en moyenne 15 à 20 minutes. Il permet à la diététicienne d’évaluer l’état nutritionnel et de prodiguer les premiers conseils pratiques afin d’améliorer les apports nutritionnels et l’alimentation. Par exemple, en cas de dénutrition, elle pourra mettre en place l’enrichissement, donner des conseils en cas de perte d’appétit et si nécessaire demander de se rapprocher du médecin traitant pour la prescription d’un Complément Nutritionnel Oral. Afin que les patients puissent conserver une trace écrite mais également pour que les équipes du domicile puissent s’y référer, un compte-rendu détaillé et des « fiches conseils » en rapport avec les problématiques nutritionnelles relevées sont transmises aux patients par le biais des équipes du SPASAD.
Une fois le bilan nutritionnel réalisé avec la diététicienne, le patient est suivi de manière mensuelle par la diététicienne et les équipes du SPASAD pendant 3 mois.
Tout au long de ce suivi, la diététicienne va émettre des recommandations (des conseils) selon les retours faits par les professionnels du domicile et le recueil d’information de la diététicienne auprès du patient.
La collaboration peut s’inscrire dans le cadre d’une action nutritionnelle de prévention de la perte d’autonomie ponctuelle : elle peut alors bénéficier d’un financement de la Conférence des Financeurs de la Prévention de la Perte d’Autonomie (CFPPA). Ce financement est total, et peut même couvrir quelques heures de ressources humaines côté SSIAD ou SAAD afin de garantir un lien fort entre le Service et CDIET. Il a toutefois vocation à ne durer qu’un an, et permet généralement de lancer la collaboration dans des conditions très favorables avant de chercher une autre voie de financement, comme celle citée ci-dessous.
Les conseils départementaux financent également le suivi CDIET via les plans d’aide APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie) ou dans le cadre des CPOM (Contrat Pluriannuel d’Objectifs et de Moyens). Dans ce cas-là, les financements s’inscrivent officiellement dans les plans d’aide de la personne ou dans le budget du SAAD. Ce financement est généralement total, mais il peut demeurer un reste à charge pour le bénéficiaire dans le cas de l’APA. Par ailleurs, ce financement court sur une durée d’un an 3 à 5 fois renouvelable, et permet souvent de cibler la totalité des bénéficiaires du SAAD à risque nutritionnel, soit environ 40 % des patients.
Shamyroko une de nos diététiciennes, réalise le bilan nutritionnel de Mme N. âgée de 82 ans.
Mme pèse 49.5 kg et a un IMC à 18.2. Elle n’a pas de notion de son poids habituel mais les aides à domicile signalent une perte de poids visible. Son MNA est à 6/14 (risque nutritionnel avéré). 2 Compléments Nutritionnels Oraux (CNO) ont été mis en place car les équipes suspectaient que depuis une dizaine de jours, Mme oubliait de manger. Pas de retour sur la consommation de ces CNO. Shamyroko recommande l’enrichissement de son alimentation et un suivi de la consommation des CNO (en surveillant que le stock diminue bien pour ne pas que Mme trouve le suivi intrusif).
Le suivi s’avère compliqué car Mme N. est réfractaire aux passages du SSIAD puisque cela perturbe ses habitudes et peut se braquer quand elle juge les questions intrusives. Toutefois, Mme poursuit la prise de CNO et a bien mis en place l’enrichissement.
Mme N. pèse 50kg, elle a donc pris +0.5 kg. A ce jour, elle consomme toujours ses 2 CNO et poursuit l’enrichissement de son alimentation.
Mme N. pèse 53kg (soit +3.5kg en 6 mois). Son IMC est donc passé de 18.2 à 19.5. En plus, une aide à domicile a été mise en place pour accompagner Mme lors de ses sorties qui sont plus fréquentes maintenant.
On constate bien que l’état nutritionnel de Mme N. s’est amélioré et qu’elle a gagné en autonomie. Ceci est un bel exemple de l’impact du suivi nutritionnel qui permet d’améliorer la qualité de vie et la santé des bénéficiaires.
L’objectif est de ramener Mme N. à un état nutritionnel correct et de stabiliser son poids. Une fois cela fait, nous pourrons diminuer progressivement le recours aux CNO en les remplaçant par des laitages.
Retour de l’IDE de Mme N : « Avec le suivi, on voit bien que Mme N. va bien mieux. Elle sort plus et a repris du poids, c’est positif. »
Retour de Shamyroko : « Le suivi de Mme N. est un suivi comme on les aime. Mme perdait du poids avant notre prise en charge et à trois mois, tous ensemble, on a réussi à stabiliser son poids et même mieux! Elle a pu prendre 500g. Chez quelqu’un qui perdait du poids régulièrement, reprendre du poids c’est une belle victoire. Alors à 6 mois +3.5kg c’est top! Cette prise de poids est multifactorielle. Elle est dû à l’adhésion de Mme N. mais aussi à la complémentarité entre diet, équipes soignantes et professionnels du domicile »
Grâce à la collaboration entre les équipes du COSI et la Diététicienne CDIET, le suivi individuel permet au COSI d’offrir une prise en charge optimale à leurs bénéficiaires. Cela permet d’améliorer le statut nutritionnel des bénéficiaires mais aussi de favoriser le maintien à domicile le plus longtemps possible et ainsi de privilégier le bien vieillir !
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